Pillages, incendies, affrontements... Le point sur la violence " assez inouïe " à Nouméa

Source: Le Huffington Post

NOUVELLE-CALÉDONIE - Violences, pillages, véhicules incendiés... Après des troubles d'une " grande intensité " en écho à l'examen à Paris d'une réforme constitutionnelle dénoncée par les indépendantistes lundi - qui ouvre le scrutin provincial aux résidents installés depuis au moins dix ans sur l'île -, la situation restait très tendue ce mardi 14 mai dans l'agglomération de Nouméa en Nouvelle-Calédonie, les autorités évoquant même une violence " assez inouïe ".

Dans la matinée, le gouvernement du territoire français d'outre-mer a lancé un appel à " la raison et au calme ", mais qui reste pour le moment peu entendu au vu de l'intensité des violences et incendies sur place. Le HuffPost fait le point sur la situation ci-dessous.

Le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie a rapporté ce mardi " des tirs tendus avec des armes de gros calibre, des carabines de grande chasse, sur les gendarmes " lors de violences sur la commune du Mont-Dore. " On n'a pas de morts, il n'y a pas de blessés graves pour l'instant, il y aurait pu y en avoir ", a déclaré Louis Le Franc en conférence de presse, en appelant au calme.

" Toute cause mérite d'être défendue politiquement, mais elle ne mérite pas de l'être en engageant des actions mortelles contre les gendarmes, contre les habitants, sur l'agglomération de Nouméa ", a ajouté le haut-commissaire.

" Sur la ville de Nouméa, l'action est menée essentiellement sur les quartiers Nord avec des destructions de commerces, de pharmacies et de domiciles ", a poursuivi Louis Le Franc. " Car on a malheureusement pu constater des exfiltrations d'habitants " avant que leurs " domiciles ne soient brûlés ".

Les pompiers de Nouméa ont dit avoir reçu près de 1 500 appels dans la nuit de lundi à mardi et être intervenus sur environ 200 feux. Selon un regroupement patronal, une trentaine de commerces, d'usines et d'autres entreprises ont été incendiés, tout comme une centaine de voitures.

Ce mardi, la circulation était rendue difficile par des carcasses de voitures incendiées ou encore des tas fumants de restes de pneus et de palettes.

" Le commissariat à côté en feu et une voiture aussi, devant la maison, des hurlements incessants et des explosions, j'avais l'impression d'être en guerre ", a confié à l'AFP Sylvie, calédonienne depuis plusieurs générations. " On est seuls en fait. Qui va venir nous protéger ? " s'interroge-t-elle.

" Je n'arrive pas à parler. Toute notre vie était dans ce dock et tout est mort. J'ai de la déception et aussi du dégoût ", a témoigné de son côté Joëlle Vincent, gérante d'une société de gros en alimentation située à Dumbéa, une des villes de l'agglomération nouméenne, incendiée ce mardi au petit matin.

Si la situation semblait un peu plus calme ce mardi matin, les rues sont encore le théâtre d'affrontements et de nombreuses scènes de chaos, notamment en banlieue nouméenne où un supermarché, forcé à la voiture-bélier pendant la nuit, continue d'être pillé par la population. De nombreux commerces portent également les traces de tentatives d'effraction.

En marge de la fermeture des commerces, les réseaux de transports en commun ont été coupés. L'aéroport international est fermé et la compagnie Aircalin a suspendu ses vols pour la journée de ce mardi.

Les déplacements dans l'agglomération sont par ailleurs extrêmement difficiles, de nombreux barrages ayant encore cours. Des points de blocage rendent particulièrement compliquée l'intervention des forces de l'ordre, d'autant qu'elles doivent être présentes pour sécuriser le travail des pompiers.

Le gouvernement calédonien a aussi annoncé la fermeture des lycées et collèges jusqu'à nouvel ordre.

Un couvre-feu a été décrété de mardi 18h à mercredi 6h. En outre, tout rassemblement est interdit dans le grand Nouméa, de même que le port d'armes et la vente d'alcool dans l'ensemble de la Nouvelle-Calédonie, annonce le haut-commissariat, qui invite les 270 000 habitants du territoire à rester chez eux.

Alors qu'un vote solennel était normalement prévu ce mardi après-midi, les débats à l'Assemblée nationale n'ont pas pu être menés à leur terme dans la nuit, en raison d'un grand nombre d'amendements déposés notamment par le groupe Insoumis. Le nouveau calendrier sera acté ce mardi matin.

Après celle du Sénat, l'approbation de l'Assemblée est nécessaire pour faire cheminer le texte, avant de réunir le Parlement en Congrès pour réviser la Constitution, à une date qui reste à fixer.